Il était une fois l’umami

Il y a déjà un mois de cela, alors que nous étions accueillis par deux grands chefs dans leur cuisine en Provence, un léger débat est venu interrompre les festivités gustatives autour des saveurs.

La scène se déroule ainsi :
- « Et voilà un plat qui reprend les quatre saveurs primaires et la cinquième… », dit le chef
- « L’umami… » interrompais-je sûre de moi et voulant briller devant mon preux chevalier qui accompagnait ma soirée
- « Non, la fadeur », répondit le chef cultivé et sûr de lui.

S’ensuivi alors un débat sur la cinquième saveur – c’est ok pour moi si vous nous lâchez ici je comprendrais – débat qui consistait alors à savoir si cette dernière était l’umami ou la fadeur.

Pour ceux qui sont encore avec nous, rapide retour sur les saveurs qui ne font pas débat. Evidemment, vous le savez-tous, la bouche répond à quatre saveurs primaires – saveurs pas couleurs – le sucré qui se situe sur le bout de la langue, le salé qui se situe juste à côté de part et d’autre de la langue, l’amer localisé au fond de la bouche un peu en haut vers le palais et l’acide qui nous fait grimacer, aux extrémités du fond de la bouche.

Si tout le monde est d’accord avec cela, une autre saveur, elle, liée au glutamate et à un goût plaisant dit « savoureux », tourne autour de nous depuis des siècles. D’abord détectée dans le garum (sauce de poisson fermentée de la Rome Antique) puis signalée par Brillat-Savarin comme osmazone en 1825, c’est un chercheur japonais, Kikunae Ikeda qui définira cette saveur comme identitaire et qui sera reconnue comme la cinquième saveur en 1987 l’«umami ».

Si l’umami est japonaise, qu’elle rappelle le goût du bouillon dashi et qu’elle est typique du glutamate de la viande, qu’en est-il de la fadeur ? Ainsi, ce chef trois étoiles avec lequel je débattais me parlait de la fadeur du poisson cru…voulait-il prendre sa revanche sur tous les maîtres sushis de Kyoto et décider que leur plat phare était emblématique d’une certaine neutralité ?

Toujours est-il que le débat a eu lieu et qu’il me permet aujourd’hui de partager avec vous les Osso Bucco des us et coutumes des plaisirs buccaux… Je crois qu’il est temps pour moi de m’arrêter là.