Le champignon de Paris

Les goûts et les couleurs ne se ressemblent pas… Et pourtant, parfois, un goût appelle une couleur et vice et versa. Nous avons fait appel à Didier Michel, chromaticien plasticien, qui se propose de passer au crible de son odorat et de son goût un produit de gastronomie. Ce spécialiste de l’harmonie des couleurs est ainsi capable de dresser une carte chromatique pour donner à voir, ressentir et comprendre l’univers de l’aromatique et du goût. La couleur du goût.

Texte: Myriam Darmoni


Face à la concurrence mondiale, le champignon de Paris fait de la résistance. Il existe encore des producteurs passionnés en Île-de-France. Chaque jour, ils perpétuent la tradition pour mettre en lumière cette merveilleuse tête blanche, tout droit sortie de leurs caves. Apparu à Versailles sous Louis XIV, le champignon de Paris a vu sa production exploser dans les carrières parisiennes du 15e arrondissement. Température idéale, humidité et fumier de cheval lui permettent de prospérer. Les champignonnières parisiennes connaissent leur apogée au xviiie siècle, il y en a alors des centaines. Les catacombes sont leur royaume, mais la construction du métro va les en déloger. Direction Saumur et l’Anjou. Toutes ? Et non, grâce à une poignée de producteurs enthousiastes, on trouve encore des champignons en Île-de-France. Bichonnés, ils sont produits « à l’ancienne » : dans des caves sur du fumier composté. Le résultat ? Un champignon croquant, bien blanc, à la saveur inégalable : celle du terroir parisien !

DÉGUSTATION ANALYTIQUE CHROMATO-SENSORIELLE

Méthodologie : percevoir et discriminer les différentes senteurs de l’analyse sensorielle des champignons de Paris, dans leur ordre d’apparition sur une durée de 60 minutes environ. À chaque senteur, j’opère la correspondance couleur à l’aide du nuancier Pantone. Ainsi, le premier nez assez frais (à 16 °C) m’oriente sur des notes d’ambiance environnementale, 15 minutes plus tard s’exprime (à 20 °C) le cœur du champignon avec toutes ses caractéristiques et enfin 30 minutes après, plus réchauffé (à 22 °C), c’est le terroir davantage boisé et minéral, sources vitales, qui s’exprime à son tour. La synthèse proportionnelle a pour but de restituer par un visuel (surfaces ajustées en proportion, selon l’importance aromatique) l’impact global aromatique et gustatif, imprimant ainsi dans la mémoire un ressenti subjectif.

LA CARTE CHROMATIQUE DES CHAMPIGNONS DE PARIS BLANCS BIOLOGIQUES

 

Texte : Didier Michel

AU NEZ : En premier nez, expression d’humidité de cave enveloppant des notes lactiques et fermentaires évoquant l’humus de souche noisetté.
En deuxième nez, petite acidité légèrement piquante, évoquant des notes minérales de calcaire et de silice, appuyée d’une note poivrée.
En troisième nez, confirmation du corps du champignon exprimé par des notes onctueuses, souples, mates et tactilement proches de la peau délicatement tourbée.

EN BOUCHE : Résistant à un doux mordillement, le champignon de Paris dépose, en fond de palais, un goût de boisé fumé, terreux minéral, avec une linéarité sensuelle très fondante

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La céramique par Maison Matisse
Les goûts et les couleurs ne se ressemblent pas… Et pourtant, parfois, un goût appelle une couleur et vice et versa. Nous avons fait appel à Didier Michel, chromaticien plasticien, qui se propose de passer au crible de son odorat et de son goût un produit phare de la gastronomie.